le monde merveilleux de lucien

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CHAPITRE SOIXANTE SIX

 

Il ne suffit pas de marcher dans le bon sens...

Encore faut-il prendre la bonne direction!

L'école buissonnière contredit son non-sens,

Quand elle fait enseignement de prédilection.

Chasser le naturel pour des poètes ingénus,

Allume l'artifice dans le feu de leurs nues:

Quand leur âme fait entité de par l'esprit gris;

L'irréel est de leur voyage en chemin infini.

Le mystère absolu de la biogénétique:

Fait belle nature qui engendre hypothétique,

Un gendre sourd qui dans un autre genre demain,

Confondra l'ésotérisme d'après feu l'humain.

Alors il ne sera plus qu'horizon sans le ciel:

Quand tomberont les larmes pétrifiées sans leur sel

D'une âme s'épanchant le cœur en flux lacrymal,

Près d'un soleil se mourant sous penchant d'animal.

Mais l'esprit en l'état niera son état d'esprit.

Reflet mica de la pensée noire biotite...

Il se mirera dans de la glace stalactite,

Accrochée Damoclès: sous le ciel de son lit.

 

 

      Campé tel un gladiateur superbe et que l’on veut capable de combattre plusieurs lions à mains nues: l'Ange dieu Néphysthéo se trouvait à présent loin de la sphère protectrice de Gabryel. Habygâ, qui était restée à bord avec la Fée Gardienne, entreprit aussitôt de la déplacer, afin de la mieux protéger, s’adjoignant alors le barrage complice de multiples branchages qui se plurent à s'ouvrir pour la laisser les pénétrer pour mieux après s'entremêler inextricablement. C’est donc pas moins de trois grands Arbres Faye, qui, mettant à contribution leur position triangulée, obéissaient à une géométrie suffisamment serrée pour permettre qu'à l'orée de la forêt du pays des âmes en transit, les deux occupantes de la sphère s'en trouvent triplement sécurisées.

Devant Néphysthéo, on pouvait voir la barrière de lumière ayant servi à leurrer Athaânas reprendre son aspect initial de vaste cylindre crépitant et lâchant çà et là quelques molécules étincelles. Et si l'on ne savait en rien de quoi restait encore capable l'Ange Gris sensé se trouver à l'intérieur, c'est que jusqu'ici ce dernier n'avait fait qu'esquiver les attaques. Pourtant, comme tous les Archanges munis d'une grande puissance, Athaânas devait bien posséder au moins une arme secrète… C'est ce que songeait avec tant de force l'Ange dieu de lumière qu’il en fut entendu…

 

– Tu as raison fit une voix venant du cylindre! Et tout Ange-dieu que tu es, il se trouve que tu n'aurais pas dû quitter la protection de ta sphère, car je vais te détruire!

– Dis-toi bien que l’idée fait réciprocité, vil bâtard!

– De quoi veux-tu parler, lui répondit l'Ange Gris.

– Pauvre sot d’emplumé! À l'inverse de toi, ce ne sont pas les injures qui me feront perdre patience! Dis-toi bien que j'ai pour alliée la force d'amour! Alors que ta parole fielleuse ne fait guère prononciation que de propos haineux qui n'ont pas, et n'auront jamais long cours ici, sur cette planète, laquelle appartient et n'appartiendra jamais qu'aux seuls dieux de lumière et de bonté!

 

Néphysthéo s'attendait à une réponse acerbe de l'Ange Gris. Ça lui eut été utile afin qu'il puisse mettre en place comme prévu son plan de harangue acrimonieuse. Mais au lieu de cela, ce fut le silence qui s'installa: un silence à la froideur implacable, lourd de solitude, et qui préludait probablement à quelque possible traîtrise…

 

– Mon chéri fit la voix d'Habygâ s'intercalant dans le subconscient de l'ange-dieu de lumière, il se trouve que j'ai réussi à pénétrer mentalement son âme, et que j'y ai découvert l'essence d'une chimère: la Gorgone!

– Ton épouse te dit vrai ricana Athaânas!

 

Et puis tout se tut à nouveau, le silence faisant place à un mutisme qui serait pareil au vide impressionnant d'un gouffre sans nom, sans fond ni mesure. À peine troublé par le crépitement de quelques étincelles… Enté théorie spécieuse d'un désert foncièrement mauvais et probablement inhabitable, sinon que par une lie vicieuse grouillante de scorpions: il pouvait sembler que l'espace-temps-de-vie concédé par l’inaction du grand Ange Gris allait devoir les figer tous deux éternellement, dans une sensation d'isolement total, installant l'inquiétude jusqu’à pouvoir modifier les battements cardiaques de Néphysthéo... Lorsque jaillit soudain un son si aigu que seule l'ouïe exercée d'un ange-dieu pouvait le percevoir. Et puis cela descendit de demi-ton en demi-ton, pour se faire de plus en plus grave et tout aussi puissant.

 

---Bon sang, pensa l'Ange dieu de lumière: qu'est-ce qu'il me fait? Et puis, il me semble bien que l'énergie du cylindre décroît d'autant que la tonale devient grave…

– Quand il apparaîtra: surtout, ne le regarde pas directement! Prévint encore dans son esprit la voix bonne conseillère d'Habygâ!

 

Aucune précision d’action ne lui étant parvenue avec l'avertissement judicieux. Alors, par prudence, Néphysthéo procéda à la dématérialisation totale de son corps. S’affranchissant comme le lui avait enseigné un certain Ange déchu vivant sous la Terre, il ne conserva d’utile que l'énergie de la Lumière des Justes, dont l'éblouissement produit la particularité qui permet à certains êtres de masquer, d’éparpiller, ou eau contraire de concentrer les particules de matière qui les constituent. Ainsi quelle que soit la chimère qui apparaîtrait une fois que l'activité énergétique du cylindre aurait suffisamment décru pour qu’elle se libère, Néphysthéo serait prêt à bondir vers un ennemi quelque peu astreint par son action contre la force magnétique du cylindre qu’il devrait d’abord réduire pour s’en libérer.

 

*

 

      Cependant que là-bas dans les branchages, à l'intérieur de la sphère, l'émoi était à son comble. Le peu qu'Habygâ avait pu percevoir, mentalement elle aussi, de ce qui se tramait à l'intérieur du cylindre d'énergie, n'avait rien de rassurant. Et du reste, elle venait de proposer à la Fée Estarie de commander aux trois Arbres Faye de libérer la sphère, afin qu'elle puisse se rapprocher de son mari qu'elle était seule à détecter, lorsque pourtant une voix puissante, bien que se voulant rassurante l'en dissuada:

 

– Si tu fais cela Habygâ: non seulement tu modifieras ton Karma, mais en plus, tu prendras le risque d'ouvrir une brèche temporelle de ce côté-ci de l'univers. Et alors, ne manqueraient certainement pas de s'y engouffrer le hasard et ses aléas. Ton couple a certes pour mission de débarrasser Yäga de cette entité ennemie. Mais la réalisation de ton destin est aussi liée à l'évolution du genre humain. Alors, accepte ce qui se fait ici pour que grandisse la force et la gloire de ton mari... Je te le dis: ne te laisse pas dominer par le sentiment bien naturel que te dicte ton instinct de compagne, mais agis plutôt selon ta conscience de Grande déesse dévolue à me servir... Déesse Habygâ: réfléchis bien, et surtout, garde-toi maintenant d'agir dans l'empressement. Car tu possèdes l'arme qu'il te faut pour aider utilement Néphysthéo à vaincre Athaânas, et ce, autrement qu'en te mettant toi-même en danger...

– Qui... êtes-vous, demanda Habygâ?

– Je suis celui que ton fils servira...

– De quel fils parlez-vous? Car, à ce que j’en sais, je ne suis pas encore fécondée…

 

La précision qu'attendait la déesse de lumière n'arriva pas, ou alors, c'est qu'elle fut couverte par le grand crépitement que fit le bouclier-barrière en s'effondrant d'un coup sur lui-même, laissant apparaître une chimère de plus de quatre mètres de haut, et dont le corps, noir et luisant autant que celui d'une vouivre gluante, apparaissait muni d'une longue queue fourchue couverte d'écailles. À présent, Athaânas ne ressemblait plus à une créature de nature semi-humaine. Il était devenu une véritable monstruosité noire, et dont le cou démesuré supportait deux têtes dont une ressemblait à un nœud de serpents prêts à bondir.

 

– Attention! Cria instinctivement Habygâ.

 

De toute façon, l'avertissement qui arriva trop tard, serait probablement perçu comme caduc. De fait, Néphysthéo avait réagit comme il jugeait bon. Optant pour le meilleur abri qui soit disponible devant lui, il entra carrément à l'intérieur de ce qu'était devenu l'Ange mutant: un prédateur gavé de l'énergie qu'il venait de prélever du bouclier-barrière, et qu'il s'était employé à ajouter à celle déjà obtenue durant son séjour dans l'essence et la nature d'un Arbre-leurre néanmoins relié par le sol à celui de la Connaissance...

 

¤

 

      Morganie était en contact mental autorisé avec Gabryel, et puisque le plan de bataille se déroulait exactement selon ce qu'il avait prévu: le Grand ange-dieu de lumière qui n'ignorait pas que l'énergie hologramme admissible à être utilisée sur le continent des dieux, dépendait de celle mise à mal par Athaânas, avait brièvement contacté Habygâ et Néphysthéo, par télépathie. Et cela juste avant que ne se produise l'affaissement de la passerelle lumineuse. Ainsi il avait pu confirmer qu'il ne fallait rien changer des actions prévues.

Les préparatifs de la cérémonie Athsériane n'avaient pas traîné. Et déjà la Fée prêtresse Èrmandine s'était élevée considérablement par rapport au sol sacré. Tandis que le miroir réflecteur avait été de nouveau pré réglé. Il s'agissait cette fois de renvoyer la lumière céleste, vers un point précis que gérerait Morganie, partie préalablement par la voie des airs, et qui se trouvait à présent assez proche de l'endroit prévu. Elle le préciserait à sa sœur à l'instant voulu. Mais pour l'instant il lui fallait contacter la déesse blonde.

 

– Habygâ!... Fit l'esprit de la combattante en usant à nouveau du dialecte Athsérian.

– Qui me parle à présent? Répondit l'interpellée dans le même langage toujours incompréhensible par l'Ange-Gris-gorgone

– C'est moi: Morganie.

– Alors, sois la bienvenue ma tante, car vraiment, le moment que je vis m'est pénible! Mais où es-tu?

– Je suis juste au-dessus de toi, mais tu ne peux me voir, car par prudence je me suis cachée au centre d'un nuage.

– Vois-tu ce que fait Néphysthéo?

– Non, car s’il n’est plus visible, c’est qu'il est occupé à œuvrer contre l'esprit d'Athaânas, car déjà ce qui la pseudo Gorgone n’est plus que souvenir, sauf que comme moi il se pourrait qu’il aie besoin de toi.

– Que crois-tu que je puisse faire d'utile pour l'aider, et te seconder à la fois?

– Le mieux serait que dans un premier temps tu utilises toute ta force mentale pour contrer celle du prédateur.

– Et bien c'est entendu…

 

Néphysthéo maîtrisait parfaitement son action d'intrusion pour l'avoir réussie autrefois contre Belzéé. Il était conscient qu'à l'époque, son ennemi avait accepté sa défaite sur parole, et que n'ayant pas à le détruire, il l'avait quitté sans plus rien tenter d'action susceptible de le mettre lui-même en péril. À présent la situation était donc très différente. Il n'était plus question d'épargner un ennemi qui ferait mine d'être simplement intimidé par une manœuvre diplomatique, mais bien au contraire de le détruire! Et en cela, l'Ange dieu de lumière était novice. Par définition, il était comme Gabryel: un dieu pacifiste. Et Athaânas qui le savait ne tarda pas à faire ce qu'il faut pour le déstabiliser:

 

– Pauvre fou, avait commencé l'esprit profond. (Le subconscient non abordable de L'Ange Gris s'adressait intérieurement à celui de Néphysthéo:) Sache que le fait d'adopter ma propre technique ne te servira pas beaucoup, puisque je suis fait d'énergie hybridée sur la tienne. Si tu tentes, comme je m'y attends, de détruire mon être de l'intérieur, c'est aussi une partie non négligeable du tien qui s'y trouve à présent incorporé que tu détruiras!

 

Néphysthéo le scientifique savait cela, mais il ne répondit rien à la mise en garde télépathique. Il accordait maintenant son psychisme sur la longueur d’onde qui lui parvenait clairement depuis un endroit précis du cerveau qu'il tentait d'occuper au maximum. Ainsi, il venait juste de découvrir la faille que Gabryel lui avait conseillé de chercher en toute première action. Elle se trouvait dans le vortex cervical qu'Athaânas avait choisi de rétracter dans sa propre moelle épinière afin de pouvoir scinder son cerveau, et en l'occurrence, ce que l'ange-dieu de lumière pouvait percevoir était de l'énergie émanant de particules d'âme, lesquelles étaient résiduelles de L'HOMBRE.

 

– Tu ne feras pas cela, avait lancé la partie reptilienne de l'esprit partagé qui venait de s'en rendre compte: car si tu détruis ce qui reste de ton père...

– Je vais me gêner!

– Non! Tu ne... Haaah…

---Son esprit souffre avant même que je l'attaque, pensa Néphysthéo qui en fait, n'avait encore rien fait d'autre que d'investir l'Ange gris, comme on entre dans une citadelle par un passage secret indéfendable… C'est donc que je reçois de l'aide de l'extérieur, se réjouit alors l'ange dieu de lumière, qui du coup, se sentit plus rassuré. Et en l'isolant comme un anticorps englobe un virus, il commença sans le moindre ressentiment à se saisir de ce qui subsistait d'un mauvais père... Souvenir d'un temps malsain dont l'avait délivré un grand amour, celui de la déesse Habygâ.

– Aaahh…

 

Au double sifflement de bête qui s'échappait de deux gueules de crotale à présent devenues identiques, Morganie comprenait que la déesse Habygâ faisait du bon travail. Bien que la brune guerrière savait pertinemment que cela ne suffirait pas à détruire un être mutant disposant d'une telle force. Sinon que tout au plus, réussir à l'abrutir un peu. Ou au mieux, le rendre groggy pour un court moment. Mais en revanche, cette stratégie mentale avait probablement pour effet de diviser la fonction cognitive du monstre. Et donc d'aider Néphysthéo dans l'accomplissement du processus qu'il avait entrepris: celui qu'il pensait capable d'appauvrir les facultés mentales d'Athaânas. Et puis de toute façon, la chasseresse ne devait rien faire d'autre que renseigner l'opérateur qui s'activait au réglage fin de la parabole. Elle savait aussi qu'elle devait attendre… Il n'était pas question d'agir physiquement contre l'ennemi tant que Néphysthéo ne serait pas ressorti du corps qu’il avait investi.

 

– Ahhh... Tu... Ne... T'en tireras pas... En réduisant mon cerveau de quelques neurones... Et d'ailleurs, si tes alliées parvenaient, mais c'est improbable, à me faire perdre un peu de mon énergie, alors tu le subirais aussi…

 

L'ange-dieu de lumière n'ignorait pas qu'en effet, il disposait d'un temps relativement court pour découvrir enfin ce qu'il pouvait faire de vraiment utile afin qu'au moins, ce corps reptilien en soit suffisamment perturbé. Alors il prit grand soin de trouver les quelques particules issues de déité Noire qu’il cherchait. Puis, afin de faire bonne mesure de son intervention, il la compléta son action en endommageant une artère cervicale, dans le but de provoquer un début d'anévrisme. Et ne voyant plus rien qu’il puisse faire d’autre, il procéda à l'acte de sortie volontaire...

Mais... cela ne se fit pas !…

 

– Je... J'ai pro... Programmé... l'énergie du bouclier-barrière contre toi !... Et alors tu ferais bien de réparer ton dégât, car si je m'amenuise en raison du sang perdu...Tu le seras autant que moi éructa l'Ange Gris qui savait la gravité de l'hémorragie provoquée par Néphysthéo.

 

L'ange-dieu de lumière n'était pas fait à l'image de cette entité, qui se débattait avec véhémence contre la force mentale extérieure d'Habygâ, et cette mutilation intérieure. Il pensa même si fort son message télépathique que tous l’entendirent:

 

– Par la puissante Lumière des Justes: Ô toi le Très-Haut qui m’a créé, je t'en conjure, donne-moi la force de m'extirper de cette ignoble créature qui osa te braver !

 

Alors, une sorte de brume rouge, étrangement vaporeuse, apparut peu à peu. Cela semblait émaner du sol et à l'endroit précis où se trouvait le dangereux prédateur. Et s'il s'en inquiétait, c'est parce qu'il pouvait la voir sortir exactement par là où il avait lui-même puisé l'énergie du pseudo bouclier-barrière. Cela en le touchant commença par colorer lentement ses membres inférieurs. Le phénomène s'apercevant plus particulièrement dans les endroits où la peau est moins épaisse. C'était comme si des milliers de fourmis rouges avaient entrepris de le dévorer! L'horrible prédateur tenta de s'en défaire en gesticulant. Mais il organisait sa pensée si maladroitement, qu'il déverrouilla, l'espace d'une seconde, le maléfice retenant Néphysthéo. Alors, de nouveau, il avait fait usage de toute sa force mentale qu'il venait d'unir cette fois à celle d'Habygâ. Et cela lui avait permis de jaillir enfin par l'une des deux gueules sifflantes et puantes. Laquelle certes se referma, mais un peu tard!

Néphysthéo était exténué: en se matérialisant plus lentement qu’à l’habitude, il savait qu'il courrait un autre danger. Mais pour cette fois, il avait fait usage de précision. Sans doute aidé en cela par Habygâ: il se trouvait l’avoir rejointe à l'intérieur de la sphère! La déesse en pleurait d'amour et d'émotion. Elle-même se sentit soudain épuisée. Elle avait tant à la fois participé et craint pour son mari!

 

– Ne... Ne perdons pas... De temps! Lui dit Néphysthéo. Il... Il nous faut quitter cet endroit... Car crois-moi… Il y a tellement d'énergie dans ce... heu... Cette bête, qu'elle pourrait encore se révéler dangereuse… Même si je l'ai grièvement blessée dans sa partie animale.

– Sans compter que l'ange gris est loin de se trouver complètement démuni, confirma Gabryel toujours relié par télépathie avec sa fille. Nous devons prendre en considération une possible immunité de sa partie sombre précisa-t-il. D'ailleurs il n'est pas à exclure que si nous lui en laissons le temps, sa grande proportion d'énergie grise pourrait bien réparer celle de matière noire, et faire qu’une fois confondues tout serait à recommencer!

 

À peine avait-on "entendu" l'avertissement du Grand dieu Ange, que l'on put voir en effet l'animal, qui de paralysé à rougeâtre, revirait imperceptiblement au gris, avec ça et là des tressautements musculaires! Tandis que pour les occupants de la sphère, le trop lent processus de retrait des arbres Faye pour la libérer de son camouflage naturel, semblait devoir durer encore le temps d'une petite éternité d'angoisse intense. Malgré que la Fée Estarie, qui en avait repris le commandement, faisait pourtant ce qu'elle pouvait pour accélérer son mouvement...

 

¤

 

      Là-haut dans l’azur, l'étoile de Yäga serait bientôt au zénith…. Alors les nues choisirent de disparaître…

Se trouvant elle aussi à flotter très haut mais dans l'air, Morganie continuait de renseigner l'opérateur chargé d’en capter la lumière. Mais lorsque le faisceau jaillit enfin, tel un rayon laser, il manqua de peu la toucher. Alors la chasseresse monta vivement d'une bonne centaine de mètres supplémentaires. Puis elle invita cette fois Habygâ à manœuvrer comme il faut la sphère qui était redevenue aussi belle, transparente et luisante, qu'une bulle de savon…

 

– Mon chéri, dit la blonde déesse à Néphysthéo recouvrant peu à peu son énergie… Je vais te proposer de remplacer Estarie aux commandes mentales, car...

– J'ai compris, répondit l'ange-dieu de lumière. Il suivait de nouveau l'action. Et sans perdre une seule seconde, il s'était levé. Il montra même de la vigueur dans son mouvement…

– Je sais ce que tu attends de moi, mais crois-tu que la sphère y résistera?...

– Nous le verrons... Répondit calmement Habygâ d'une voix déjà lointaine.

 

Sans attendre, elle était entrée en première phase de transe. Il lui convenait d’emprunter à présent la voie céleste qui conduit vers la puissante Athséria.

 

*

 

      Bien qu'il se montrât campé sur des jambes que lui seul savait encore faibles, Néphysthéo s'adressait de toute sa force mentale à la partie vivante de la sphère. Dans le même temps, il posait ses mains çà et là sur des endroits différents de la paroi. Alors l'entité de lumière s’était mue sans un bruit. Il lui était demandé de se placer exactement dans le champ du rayonnement puissant que la parabole, parfaitement orientée, renvoyait encore plus intense car concentré, depuis la colonne du sanctuaire où officiait une Èrmandine qui elle-même, se trouvait en plein nirvana! Elle s'élevait comme jamais elle ne l'avait pu faire avant. Puis elle disparut d'un coup des regards d'en bas: comme si elle avait été soudainement consumée par le flux de lumière sacrée .

 

Cherchant à s'affranchir de cette fixité d'enraciné qui semblait devoir le clouer au sol depuis le début de sa condition de mutant, Athaânas essayait maladroitement de se transformer en aigle, comme savait le faire autrefois L'HOMBRE, son maître. Mais du fait que Néphysthéo avait subtilisé tout ce qu'il avait pu trouver de particules restées vivantes du dieu sombre, cette ultime tentative lui était devenue impossible dans le moment présent. Et puis l'une de ses têtes lui faisait mal. Horriblement mal. Beaucoup de son sang noir qui jaillissant de l'hémorragie qu'il n'avait su juguler, commençait à comprimer et à endommager son cerveau gauche. Alors, tentant le tout pour le tout, il provoqua la synergie de son corps avec toutes ses énergies confondues. La rage aidant, il souhaitait d'obtenir la forme d'une nouvelle entité mutante, et qui serait encore plus dantesque que la précédente…

 

Cependant que sublimée par l'aura d'Habygâ, la sphère rayonnait dans le ciel! À l'intérieur, la blonde déesse se trouvait à vibrer intensément. Elle avait elle aussi rejoint le faîte du nirvana Athsérian. Mais cela n'empêchait pas que quelque cinquante mètres plus bas, une nouvelle chimère se constituait si monstrueuse, qu'on aurait pu croire de Yäga qu'elle allait cette fois accoucher d'un de ces effroyables mastodontes qui virent le jour lors de l'époque antédiluvienne terrestre!

C’est ainsi que l’on pu voir apparaître une autre gorgone: de plus de dix mètres de haut cette fois, et obtenant bon aplomb de ses jambes!

Mêlées à des cheveux plus noirs que des ténèbres prêtes à accueillir la mort d'une armée de damnés, des vouivres-serpent s'allongeaient comme des vipères grouillantes ouvrant autant de gueules dégoulinantes de leur propre venin verdâtre. L'immonde puanteur qui s’en échappait s'apparentait à celle de ces morts-vivants qui, la nuit d'Halloween, reviennent parait-il d'outre-tombe, autant pour remercier des cadeaux des vivants apeurés, que dans le but inavouable, de régler quelques-unes de leurs dettes contractées lors de comptes sordides.

 

*

 

Ce fut au moment précis où elle entrait dans le champ de la Lumière des Justes, que là-haut, la sphère avait subitement disparu… Il y eut aussi une forte déflagration qui se fit entendre en même temps! Et le tout fut suivi d'un souffle si intense, qu'on aurait pu s'attendre à voir surgir un champignon atomique... Au lieu de cela, depuis l'endroit même de sa jonction avec la sphère et suivant géométriquement la forme d'un angle à quarante-cinq degrés: c’est le faisceau de lumière qui s'en trouva brusquement dévié et dirigé sur l'endroit exact où Athaânas venait juste de terminer son horrible métamorphose…

 

Tout d'abord, l’impact ne produisit guère qu'un modeste crépitement d'étincelles. Elles s'étaient mises à jaillir de lui en tous sens. Tandis qu'émanant de son thorax, un rayonnement de couleur changeante tentait de bloquer le flux de lumière cosmique... Et puis l'on entr'aperçut avec inquiétude, que les vouivres-serpent de la gorgone commençaient à s'allonger afin d'aller fouiller l'endroit où la sphère avait disparu…

 

– Athaânas ! Que crois-tu pouvoir faire, hurla Morganie la Guerrière!

 

Elle était de nouveau décidée à le défier. Quittant sa cache, elle s'était rapprochée tout en fermant les yeux pour éviter de croiser son regard, présumant cette chimère capable de la changer en pierre, autant que celles et ceux de ses adversaires qui commettraient cette imprudence... Et puisque la brune chasseresse savait se mouvoir sans y voir, elle tira de son dos l’épée de Gabryel et s'employa à hacher les vouivres qui s’étiraient en gesticulant vers le ciel. La déesse s'appliquant de l’autre main à lacérer de sa griffe de Crôol celles qui tentaient vainement de l’atteindre.

S'ajoutant à l'hémorragie cérébrale que l'Ange Gris ne parvenait à cautériser, puisque ressurgissant comme une malfaçon à chacune de ses tentatives de métamorphose, le métal poison de la griffe de Crôol, complétait l'effet désintégrateur d’Excaliatura. L'action conjuguée provoquant une véritable hécatombe de matière. Se voyant certainement bientôt trop amputé pour y survivre sans s’en trouver diminué, l'ex-Ange Gris pensa peut-être que finalement, il ne disposait plus vraiment de la force qu'il faut pour anéantir ses ennemis. Alors il se résigna à reprendre son ancienne technique d'Ange fuyant. C'est ainsi qu'il décida de cesser son attaque. Puis il s’apprêta à sortir du cercle bouclier-barrière dont il ne savait plus tirer la moindre énergie. Mais c'était sans savoir que si celle-là se refusait, c'est parce que le sas se trouvait maintenant à obéir à un autre que lui! Réalimenté par la lumière qu'il recevait des Justes, il avait même commencé à se reconstituer. Alors... S'apercevant de cela, Athaânas eut un moment d'hésitation mentale… instant critique préparant une nouvelle tentative de métamorphose, qui fut aussitôt mis à profit par la Lumière des Justes pour doubler d'intensité. Cette fois le rayon traversa la défense de l'Ange Gris en le pénétrant d'un coup! Et l'on put voir jaillir de lui une sorte de magma noir et gris, faisant comme une petite éruption volcanique de matière, en même temps que se constituait un débordement circulaire de cendres grises. Le tout ressemblant à l'un de ces grands jets de pyrotechnie artistique, dont l'évasement fait penser à un gigantesque bouquet final. Cela projetant sur un vaste périmètre: des lambeaux de chair et de matière calcinée qui terminaient de se consumer en arrivant au sol. Alors, au centre du bouclier-barrière, il n’y eut bientôt pour seule trace qu'un peu de liquide visqueux indéfinissable...

Mais l'Ange gris Athaânas vivait encore! Certes on l’aurait pu croire anéanti, mais, fidèle à lui-même il réunit ce qu'il put de lambeaux, et le tout s'enfuit comme un haillon misérable, empruntant un couloir d'ultime envolée, lequel conduisait directement au grand trou noir situé au centre de la galaxie et qui goulûment l'avala.

 

Plus tard, quand la Lumière des Justes se fut retirée, Morganie put s'apercevoir avec soulagement que la sphère était intacte. Si ce n'est que ses occupants quelque peu sonnés, lui firent signe d’une main hésitante que de leur endroit ça pouvait aller, certes chaudement, et pas vraiment aussi bien que brillamment… De fait, ce n'est qu'une fois qu'ils s'étaient remis de beaucoup de frayeur, qu'ils firent descendre l'incroyable véhicule vivant. Lequel se posa en douceur sur le sol sacré du Pays des âmes en transit.

 

 



29/06/2021
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