le monde merveilleux de lucien

le monde merveilleux de lucien

CHAPITRE QUARANTE NEUF

 

      Lucien avait entrepris de contourner au possible la barrière que formait l'étrange et impénétrable futée. Il en avait pratiquement fait le tour lorsqu'il découvrit enfin ce qu'il cherchait. Il y avait là, entre deux buissons d'épineux, un espace qui à la condition de s'y glisser tel que le ferait un animal, pouvait lui faire envisager d'y pouvoir pénétrer. L'ouverture lui faisait penser à l'un de ces passages entre des ronces qui aurait été forcées par une laie afin d'y installer plus loin ses petits à l'abri des prédateurs. Pourtant, malgré le risque encouru de se trouver nez à groin face au dangereux animal, l'occasion lui semblait avenante. De plus, lorsque qu'il se fut accroupi afin d'inspecter ce qui s'offrait à lui, il vit que de la lumière inondait ce qui semblait en être l'extrémité, et que plus loin, dans cette lumière, apparaissaient en flou gaussien sélectif, les restes d'une ancienne construction de pierre!

 

– Décidément pensa de vive voix le jeune poète: je vais de découverte en découverte!

 

Alors, et sans plus d’hésitation, il se mit carrément à quatre pattes et entreprit d'aller ainsi jusqu'au bout de sa "folie".

Mais il avançait d’autant maladroitement qu’il craignait de se trouver nez-à-nez avec un animal de belle carrure. Lequel s'il était dérangé, serait peut-être enclin à le charger. Pourtant, se la jouant quelque peu risque-tout… Lucien se rapprochait de ce qu'il avait aperçu de loin. Sa progression se trouvait cependant ralentie par des ramifications du roncier. Mais il portait des vêtements modernes dont le tissage renforcé par des fibres de kevlar s'avérait suffisamment résistant pour n'être pas déchiré. Et puis ils étaient assez amples, ce qui lui permettait de faire face à la fantaisie présente de son "parcours du combattant". Mais s'il ne craignait de ne pouvoir mener à bien ce genre d'exercice qui malgré tout commençait à le rebuter, c’est tout de même avec un certain soulagement qu'il arriva enfin dans ce qui lui semblait être une clairière où il put de nouveau se tenir debout. Il se trouvait toutefois dans un espace où l’osmose indéfisable diffisée par un ciel mauve lui semblait suffisamment indéfinissable pour paraître angoissant. Alors qu'il s’époussetait machinalement, Lucien put se rendre compte que ses vêtements n'étaient aucunement souillés... Comme si rien ne s'était passé de cette gymnastique qui pourtant l'avait mené ici! C’était à croire qu’il se trouvait protégé par l'entremise d'un rêve étrange. Mais en revanche, ce qui lui semblait moins onirique, c’est qu’il en avait égaré son chapeau... à moins qu’il n’en eût point porté ce jour-là ? En fait il ne savait plus!

 

– Bon sang! Se dit soudain le poète, voilà que ma pensée s’embrouille autant que tout-à-l'heure en traversant ce brouillard ostensible! Bah, tant pis! Si ma tête est malade: au moins je suis vivant… Enfin, j’espère… Et puis si tant est , ce galurin, je le retrouverai bien au retour...

 

Il doutait que les quelques pierres qu’il avait à présent devant lui fussent du moindre intérêt. Sinon que celui de la découverte provocatrice et de l'imagination qui invente, ou réinvente, l'activité des personnages qui avaient dû séjourner ici, mais il y a certainement longtemps de siècles, dans ce qui devait être bâti là autrefois. Il lui venait l’image moyenâgeuse d’une petite masure couverte d’un toit de chaume. Construction de faibles dimensions, qui fut probablement utilisée en son temps par un être aussi gourmand de solitude que lui... Notre Lucien se surprit même à s'imaginer rachetant l’île, et reconstruisant la maisonnette, tout en rêvant d’improbables châteaux en Espagne. Il y songeait encore quand quelque chose de vert et mouvant, attira son regard:

 

– Bon... Voilà que ça recommence! C'est encore ces flashes s'exclama Lucien vaguement inquiet...

– Bonjour... fit entendre une voix féminine

– Madame, je sais que si vous n'êtes plus dans l'eau comme je vous ai vue l’autre jour, c'est donc que probablement vous-vous êtes cachée derrière cette ruine pour me surprendre. Alors, apprenez toutefois qu'à ce jeu de la fausse entité vous ne m'amusez plus guère puisque je vous entends à présent respirer comme une humaine!

– Perdu! Fit une petite voix dans l'oreille gauche du poète, tandis que se m'éprenant, Lucien crut à quelque acouphène venant de lui.

 

Puis il perçut un autre déplacement sur sa gauche. Il pensa que ce pouvait être celui d’un gros insecte. Ou quelque chose ressemblant à un criquet vert de belle taille. Cela venait de sauter depuis son épaule et devait être muni d’ailes pour atterrir de la sorte sur le muret qui lui faisait face à deux bons mètres! Revenu de sa surprise, le poète s'interrogea à nouveau sur sa capacité de discernement. Certes, celle-ci, depuis un bon moment, le mettait tant à l’épreuve, qu’il était tacitemant d’accord pour tout accepter sans plus ne rien se demander. De même qu’il n'osait bouger… Pourtant il décida d’avancer, mais lentement, et ce qu’il vit ensuite le conforta dans cette décision. C'est lorsqu’il en fut à deux pas qu'il se rendit compte que l'insecte en question était en fait une petite grenouille verte. Il se dit en portant cette fois son regard vers le tunnel de verdure que le malicieux batracien l’y avait suivit... mais le passage avait disparu!

 

– Bon sang! Me voici bel et bien piégé...

– Hi, hi: fit la grenouille.

– Alors là! Voici que j’ai devant moi une grenouille qui parle! Aurais-je trop subi tout à l’heure, des rares rayonnements du soleil?

– Non, non... Tu es sain d’esprit. Et puis tu m'as bien entendu te prononcer des mots, fit encore la grenouille. Et elle se métamorphosa cette fois pour prendre l'aspect d'un lutin qui se montrait à peine plus haut qu'une délicieuse pomme d’août.

– De mieux en mieux! Voici donc qu’à présent j'hallucine...

– Non mon bon Lucien, tout ce que tu vois est vrai... En tout cas, ça l'est par ce côté-ci de ton monde à toi...

– Mais de quoi me parles-tu? Et puis: qui es-tu?

– Ah, c'est vrai, je l'avoue… Pris par le jeu que tu favorises, voilà que j'en ai oublié les présentations d'usage! Alors, sache que mon nom est Topiary, et que je suis le gardien de ce parc que tu violes en ce moment par ta seule présence. Et voici Yaspaeena la fée blanche.

 

Ce faisant, le petit Aven pointait du doigt une direction précise qui montrait l'intérieur des ruines.

 

– Te jouerais-tu encore une fois de moi heu... Topiary? Car vraiment, je ne vois rien d'autre dans cette direction que des pierres qui soient reconnaissables par leur réalité, car palpables.

– C'est qu'alors tu restes trop loin de l’endroit que je t'ai indiqué, car tu es un froussard! Et l'on dirait que tu ne sais guère regarder d'autres choses que celles qui se voient facilement dans le monde des trois dimensions matérielles.

– Voici que par deux fois tu as fait allusion au monde qui m’a fait tel que je suis... Que me caches-tu de si ambigu pour t'en amuser à mes dépens?

– Ah ! Mon pauvre Lucien, les pierres qu’il te conviendrait de déplacer ici sont autres que les nues des poètes. Va-t-il donc falloir que comme pour ton précédent karma, l’on t'apprenne à voir plus loin que ton seul regard d'humain?

– De quel "précédent" veux-tu parler?

– Si de lui, tu as hérité du courage, alors, peut-être iras-tu maintenant dans la direction que je t'ai indiquée... Ce qui reviendrait à dire que tu ne souhaites pas que le charme finisse. Mais que c'est sans savoir que cela ne peut se réaliser si tu reste figé là tel un Menhir monolithique!

– C'est bon, je viens...

 

Et Lucien se décida: bien qu'il repensât à sa mère, Ashneene l'incitant à plus de prudence, il déplaça néanmoins quelques pierres. Puis il découvrit une ouverture. Alors sans savoir qu'il s’apprêtait à entrer dans la gueule du loup... il continua néanmoins de la dégager.

 

 



08/01/2021
12 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Ces blogs de Littérature & Poésie pourraient vous intéresser

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 13 autres membres