le monde merveilleux de lucien

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CHAPITRE CINQUANTE DEUX

 

      En entendant la voix féminine, le jeune poète qui s’était résigné à progresser à l’aveuglette, s’était soudain arrêté. Il analysait au mieux le peu d'informations que ses autres sens ligués continuaient néanmoins de lui fournir. D’autant que curieusement, le raisonnement qui se faisait parallèlement sur Yäga influait aussi sur le sien… Lui offrant peu à peu, à l’instar de Morganie, d'obtenir cette sorte de vision paranormale qui souvent fait jour en passant par des méandres de la théorie absconse...

 

L’image qui s’affichait doucement dans la tête du poète en premier n’avait rien d’une dame âgée. Tant s’en fallait, car l’apparition lui montrait qu’il s’agissait non de sa mère, mais plus certainement d’une superbe jeune femme… se faisant, il se prit soudain à penser à celle qui enfanta autrefois un Messie!

 

– Marie? Êtes-vous faite à l'image… de la Vierge Marie?

– Certes, mon nom est bien Marie, mais je ne suis pas celle que tu dis.

Et puis l’ensemble du lieu lui était soudain apparu…

– Alors me direz-vous enfin…? Et d’abord, comment avez-vous fait pour me permettre d’y voir à présent dans le noir mieux qu’un chat…

– Je suis la mère de Maria-Luce qui reste à naître de moi…

– Ce qui explique dans ce cas que ce soit vous qui m’êtes apparue et non celle qui n'est pas encore en vie, et que conséquement, je ne saurais connaître avant qu'elle ne soit là!

– Je te l’ai dit, celle qui sera reine en des cieux nouveaux est en moi et non l’inverse…

 

Abasourdi par le silence qui s’ensuivit et admettant l'inutilité de sa boutade, le poète pensa que son interlocutrice n’était autre qu’une nouvelle affabulation de son esprit décidément mis à mal. Il lui tourna brusquement le dos et se frotta les yeux fermés en utilisant la paume de ses mains, pour ne pas irriter ses paupières. Tout en recherchant l’appui d’une autre lumière, celle intérieure, l’incitant à la prudence, il s’apprêta donc à rebrousser chemin. Se défiant de cette étrange icône qui au contraire semblait déterminée à l’entraîner plus profondément encore, dans le ventre inconnu d’un amas de ruines.

 

– Attends! Avant repartir pour ton monde, peut-être souhaiterais tu connaître non seulement l’histoire ancienne qui guida ta lignée, et aussi ce qui te concerne à propos de la mienne? Ceci étant un bon moyen de se mieux connaître soi-même…

– Hum… dis toujours, lui concéda Lucien sans se retourner.

– Alors sache que longtemps de siècles après que tout ce qui sorti de la mer commençait à vivre sur la terre, deux des frères Ancêtres qui secoururent la déesse Ardvina, furent récompensés par la venue dans leur monde de deux demi-déesses marines. Leur obligation de chasteté ayant été abrogée par Atharie, rien n’empêcha alors la formation de deux couples. Le geste divin de cette descendante d’Ardvina permetant ainsi que naquirent, d’une part, la fée Estarie: mère d’Èrmandine et Morganie (sœurs jumelles) et d’autre part, les sœurs ondines. Dont certaines s’accouplèrent à des druides initiés, et enfantèrent à leur tour pour deux lignées, dont l’une vit naître Charles-Henry et son fils Henry…

– Tout cela, j’ai eu l’occasion de le lire dans un livre que m’a donné ma mère. C’est un bien joli roman. Mais je ne vois en rien ce qui pourrait me lier de près ou de loin, à des personnages inventés! Ce serait peut-être mieux que vous en veniez directement à mes ancêtres. Les vrais. Même si nous devons faire abstraction de vos fameux Frères Ancêtres, avec lesquels je ne me sens aucune affinité, sinon que je n’y comprends rien…

– Ceci explique généralement cela… Et si ce n’est fait pour le moment, il y en a parmi eux que tu rencontreras pourtant!

– Bon: admettons… J’entre donc dans votre livre comme je suis parvenu jusqu’ici en franchissant allégrement la frontière du monde réel… À présent, voyons donc ce qui m’attend de l’autre côté du pays de mes ancêtres s’il vous plaît.

– C’est plus compliqué. Étant donné que la mémoire concernant l’humaine que connut un descendant des Frères Ancêtres fut effacée, car jugée contraire à la loi divine, telle que conçue rudimentaire en ces temps premiers. On peut néanmoins présumer que cette femme aurait mis au monde une fée qui elle-même donna le jour à d’autres. Et dont la troisième génération connut celle de Charles-Henry: cet homme particulier dont je t’ai parlé tout à l’heure.

– Holà… Ma pauvre tête n’en peut plus. S'il vous plaît: ne pourriez-vous abréger?

– J’y arrive mon bon Lucien, j’y arrive… Et c’est bien de m’écouter. Car cela restera gravé dans ta mémoire. Jusqu’à ce que tu en fasses usage au bon moment. Alors, voici qui va simplifier: l’une de ces fées qui fut l’amante fugace de Charles-Henry alors jeune homme était ma mère, et donc celle de ma sœur Maria, simple mortelle initiée druidesse. Alors que de mon côté je suis une fée éternelle.

– Fort bien, voici que cela m’est plus clair et me fait croire qu’au moins, je ne me parle pas à moi-même en modifiant ma voix, répondit Lucien tout en amorçant une nouvelle volte-face. Mais il me semble que pour être ce que je suis, il se trouve que j’ai un père qui lui-même en eut un autre dont vous ne me parlez point !

– J’y arrive Lucien, j’y arrive: Ton père, Lucien Joseph, est le Fils du Lucien qui fut toi et qui lui-même était un frère de mon mari. Ainsi tu es un cousin de Maria-Luce qui connaîtra un destin surnaturel, bien plus important que le mien…

– Tu… Heu, vous voulez me faire croire que j’ai une cousine qui n'est pas encore née, puisque restée en vous...? Et qui en plus… serait une fée ?

– Tu peux me tutoyer, car tu connaîtras toi aussi le monde divin, et cela se produira à l’instar de Maria-Luce. Lucien! Tu es plus qu’un simple humain!

– Bon OK, cette fois tu m’as mis K.O.…

– À présent Lucien, suis-moi…

 

¤

 

 

 



07/02/2021
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