le monde merveilleux de lucien

le monde merveilleux de lucien

CHAPITRE SEPTIEME

 

7

 

Si tu entends du cœur bruissant d'une forêt,

Comme Muse tranquille un fleuve discret.

Écoute l’Elfe blanc te contant la légende,

D'une gaie nourricière enchâssée dans la lande.

La prude contourna monts et bois par le val

Bien avant qu’emportés par une Fée-cheval,

Ne fuient les quatre fils aux confins des Ardennes,

Par le vert chemin des Dames coralliennes.

Or, moi qui ne suis rien, j’aimerais qu'en mon sang:

Vive une eau grise où mirer mes rêves nacrés

Au clair d'une déesse... en montagne sacrée !

Ô vert pays de l’homme aux semelles de vent:

Dans mon cœur apaisé coulerait la rivière,

Qui fait l’amour en boucle... aux poètes d’hier.

 

 

*

 

 

      Bien qu’issus de milieux dissemblables, Athénéïse et Lucien ne pouvaient être cités dans des contextes qui seraient totalement différents…

 

Depuis qu’ils avaient sur marcher avec longtemps d'endurance, comme le fit avant eux un certain Arthur, ils avaient sillonné, presque tous les chemins environnants de la même région natale. Martelant d'un pas alerte, le gel des beautés hivernales, ou foulant durant les beaux jours, la bonne herbe chlorophyllienne quand elle s’émaille joyeusement de fleurs multicolores. Dérangeant parfois sans le vouloir les sauterelles et les abeilles, tout en saluant les corneilles. Négligeant volontiers les plaisirs superficiels, car artificiels, ils profitaient autrement que d'autres de leur jeunesse. Ils la vivaient sans ces produits électroniques d’aujourd’hui, dont beaucoup programment autrement qu'il ne faudrait... Faisant à l’inverse bon profit des visions naturelles. Cela leur offrant de croire à des mythes qui autrefois mentionnaient l'existence bien réelle d'êtres minuscules, mais bien pourvus d'une intelligence insoupçonnée. Lesquels vivant dans ces endroits merveilleux, parmi des esprits feux-follets bien éclairés. Alors que devenus incrédules en tout, nous oublions que la nymphe énamourée volette pourtant au juste son de notes faussement endiablées. Tandis que là-haut, le rire des oiseaux rebondit volontiers d'arbre en arbre, taquinant au passage, l'écureuil qui se panache et se pavane, en se gavant de la succulence des mille bourgeons de pins à la saveur miellée…

 

Ce faisant. À connaître le plaisir permanent des poètes, cela pouvait signifier qu'ils vivaient une sorte d'autarcie de rêveurs aventureux. Passant même parfois la frontière, par le couvert de la forêt d'Ardenne. Se sentant comme l’air: libres de s’en aller jusqu'en Belgique. Et peut-être même beaucoup plus loin encore… en usant simplement de la généreuse faculté de penser...

 

Athénéïse était pourtant parvenue à connaître encore plus de félicité sereine que Lucien n'en avait obtenue de son plein gré. Elle disposait ainsi, mieux que le jeune poète, d’un plus grand confort d'esprit. Elle savait depuis toujours évoluer parmi les humains, sans vivre pour autant comme eux la moindre colère vindicative. Elle était devenue une conteuse de tendresses. Une douce poétesse, profondément amoureuse de la nature qui vibrait par elle et en elle. Elle enchantait son entourage par sa présence et par sa voix. Comme le fait aussi la rivière. Et même le vent, quand-il joue à saute monts par-dessus tout le pays. Enjambant prestement les cimes des grands végétaux de la vaste forêt que contourne la Meuse. Et si le poète et la poétesse se plaisaient à l'écrire, c'était pour décrire tout l'amour et la douceur qu’ils en pensaient, s'extasiant, chacun à sa manière, de ce que dessinent de leur majesté ensoleillée les nuages qui se font gracieux dans le ciel…

 

Cependant qu’en fervent admirateur d'un poète explorateur découvreur du monde à sa manière… Lucien cultivait quant à lui l’art de la poésie comme on tente d’affiner un don. C'est-à-dire, en usant d’une fonction que l'on peut admettre pour être aidée des muses et du sacré. En l’occurrence il croyait fermement aux énergies positives. Et notamment celles qui se devinent liées au magnétisme de l’aura. Il s’admettait aussi détenir le rôle naissant de décodeur de l’invisible: Lucien pensait très sérieusement que le potentiel qui s'obtient de tous nos sens, lorsqu'ils sont un service d’un seul qui serait autre, se trouvait sous exploité par l'être humain. Pourtant, selon lui, cela ne s’obtenait pas uniquement par l’inné.

 

Et puis il écrivait ses poèmes à la manière de son siècle. Optant parfois pour un genre délibérément populaire, sachant apprécier aussi cette manière d’écrire intuitive. Ceci autorisant une expression qui impose moins la rime riche que la consonance obtenue d’un appui oral approprié. S'offrant ainsi l'avantage de ne pas s’empêtrer systématiquement la plume dans les carcans du classicisme absolu. Puisque s'ouvrant au contraire à des chemins de libertés aussi intéressants. Lesquels lui permettant d’entrer à son tour dans la jungle de la versification internationale libre...

 

Sa dominante stylistique s'écartait donc de l’hémistiche classique, puisque librement philosophique, à sa manière...

 

Certes, ce que ressentent les poètes peut devenir aussi fort que la souffrance en amour!

 

De tous ses sentiments exacerbés, Athénéïse ne saurait déterminer celui qui la pousse à venir méditer face à l’Île-Au-Manoir. Confortablement allongée sur un lit de mousse naturellement généreuse. Tout en restant bien cachée, en lisière de forêt, par un providentiel rideau de fougères complices.

Elle s'installait là, sans en connaître le but. Elle était capable d'y rester des heures durant. Occupée à prendre mentalement des notes, qu'elle esquissait ensuite par le biais de mots coloriés. Et lorsqu’elle se sentait fatiguée d'être couchée, elle s’adossait à un arbre. Mais toujours, en restant au plus près de la rive de ce lac qui se découvrait uniquement à qui sait comme elle regarder vers l'autre dimension. Celle-là qui en outre, permet la vision parallèle d'un monde différent du nôtre. Un monde situé au bout d'un discret sentier. Faisant penser qu'il allait en se faufilant vers nulle part. Comme le ferait, sereine et colorée, une aimable couleuvre, fragile de sa définition vipérine erronée, coulante, indécise, vers un repère pourtant précis: mais dont l'image en filigrane pouvait cependant la confondre en ondulation, pareille à l’autre ovipare, dangereux celui-là… Alors qu'elle n'est pas plus offensive pour l'homme que l'humble serpent de verre qui va rampant comme un ver. Doux orvet, vêtu d’argent écaillé. Mais qui se terre aussi à la moindre suspicion perçue de sa fourche-langue. La première, finissant alors par disparaître entre les noisetiers, comme lui le fait sous la mousse, après s’être prélassé devant l'or des genêts, quand ils sont richement ensoleillés.Douce et cohérente similitude entre faune et flore, s’harmonisant avec la végétation d’un petit chemin vert qui va guidant une belle vers sa vérité…

 

Les voies qui s'empruntent pour prendre la fuite ou simplement se mettre en sécurité sont parfois des sortes de passages secrets…

 

Athénéïse voyageait à ses heures, parmi des fréquences ondulatoires douées de fantaisie. Côtoyant de temps en temps, le fin chéneau creusé d'un chenal où serpente un mince filet d’eau de source féérique, semblable à un doux filin d’argent kevlar qu'une araignée de connivence aquatique, s'ingénierait à filer. Comme tissant la corde quantique qui tend la toile attachée au cadre de notre destinée. Et laissant ainsi une trace soyeuse. Seulement visible par une Belle. Et qui tel un col alpin pour lapin géant, serait une œuvre déroulée sur un tapis vert. Avec posé à cheval, un pont intemporel… Une passerelle. Porte voulue pour faire pénétrer le vortex naturel d'un sol qui serait fait pour elle. Un conduit sur fond légitime. Inséré dans une futée. Sorte de tricot fait de lianes. Pareil à une chaussette verte sans pied. Quelque chose d'abstrait. Confectionné par un elfe tunnelier futé qui serait aidé dans sa tâche, par l’intervention d’une fée quenouille buissonnière, s'assistant elle-même directement de son propre fuseau magique.

 

 



18/02/2020
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